Visiteurs médicaux : l’indemnité d’occupation du domicile n’est pas systématique
Le travail depuis son domicile n’est plus aujourd’hui l’apanage des salariés itinérants. L’actualité l’illustre plus que jamais. Est-il donc encore justifié que les visiteurs médicaux bénéficient de manière quasi-systématique d’une indemnité d’occupation de leur lieu de résidence à des fins professionnelles ?
Certes, la Cour de cassation affirme que le salarié qui occupe son domicile à des fins professionnelles à la demande de son employeur et sans disposer d’un local professionnel doit être indemnisé. Cette indemnisation procède d’une indemnité dite « d’occupation », laquelle est destinée à compenser l’immixtion de l’activité professionnelle dans la sphère personnelle.
Mais la cour d’appel de Versailles [1] a récemment rappelé que le versement de cette indemnité n’est toutefois pas systématique pour les visiteurs médicaux : le droit à indemnisation ne découle pas automatiquement de leurs fonctions.
Pour pouvoir prétendre à son versement, encore faut-il que le visiteur médical soit en mesure de prouver qu’il réunit les conditions pour en bénéficier, ce qui implique notamment de vérifier :
- si l’employeur l’a enjoint à travailler depuis son domicile, sans lui offrir le bénéfice d’un poste de travail dans les locaux de l’entreprise ;
- si l’employeur lui a demandé de stocker du matériel de l’entreprise chez lui et non dans un local professionnel, que celui-ci se situe dans l’entreprise ou qu’il s’agisse d’un box mis à sa disposition.
Une réponse affirmative à l’une ou l’autre de ces questions justifiera l’indemnisation. Dans le cas contraire, c’est-à-dire si le visiteur médical a le choix de travailler ou de stocker son matériel à son domicile ou dans un autre espace proposé par son employeur, l’indemnité d’occupation ne sera pas justifiée.
Trancher cette question est important. Il ne s’agit pas uniquement d’adopter une saine gestion mais également de prévenir la survenance de litiges avec d’autres salariés à qui l’employeur pourrait proposer de travailler à distance et qui pourraient alors trouver opportun de se comparer avec des visiteurs médicaux pour percevoir une indemnisation. Le point n’a rien de virtuel à l’heure où, malgré la fin de l’état d’urgence sanitaire, nombre d’entreprises prennent la décision de proposer le maintien du travail à distance ou envisagent de repenser leur organisation du travail par la favorisation du télétravail afin de réaliser des économies d’échelle sur le coût de leurs locaux.
Ces entreprises devront être vigilantes :
- si la réduction du nombre de postes dans les locaux contraint un salarié à utiliser son domicile pour travailler, ce dernier devra être indemnisé ;
- à l’inverse, s’il est démontré que le salarié avait le choix entre travailler de chez lui et travailler dans les locaux de l’entreprise, la société pourra échapper au paiement d’une indemnité d’occupation. Il faudra dans ce cas rappeler expressément dans les accords, chartes et avenants télétravail la possibilité pour le salarié d’exercer ses fonctions dans les locaux de la société. Restera néanmoins la question des frais professionnels exposés par le salarié.
[1] cour d’appel de Versailles, 13 mai 2020, n°17/00318
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