Crise sanitaire et rémunération variable : quels sont les enjeux pour les visiteurs médicaux ?
Le mois de mars coïncide souvent avec la période de paiement des rémunérations variables. Il n’est donc pas surprenant que foisonnent avec l’arrivée du printemps les demandes liées à la rémunération variable. Ce d’autant que bon nombre de commerciaux – en particulier les visiteurs médicaux – voient leur variable 2020, pour certains payable en 2021, impacté par la crise sanitaire. Le Covid-19 a sans aucun doute rudement bouleversé leur activité : confinements, limitations de déplacements, restrictions d’accès aux établissements de santé et activité partielle les ont pour la plupart empêché d’atteindre les objectifs fixés.
Quelle réaction l’employeur doit-il en pratique adopter face aux demandes de visiteurs médicaux mécontents ?
Il convient avant toute chose de se poser les questions suivantes :
- Les objectifs auraient-ils dû être ajustés ?
Les objectifs doivent être réalistes et réalisables. Si la crise sanitaire a certainement eu un impact, ces conditions ne s’apprécient qu’à la date de leur fixation. Dès lors, aucun ajustement n’était requis par le droit du travail.
- Malgré la diminution de la rémunération variable, les minimas sont-ils respectés ?
La rémunération variable ne doit pas entraîner une baisse de la rémunération du salarié en-deçà des minimas légaux ou conventionnels. Si tel était le cas, il faudrait envisager une revalorisation de la partie fixe ou variable de la rémunération avec éventuellement le versement de rappels de salaire.
- Les objectifs ont-ils été communiqués au salarié suffisamment en amont ?
Les objectifs sur lesquels repose la rémunération variable doivent être communiqués suffisamment tôt au cours de la période de référence. A défaut, l’employeur s’expose à des demandes de rappel de bonus sur l’intégralité, peu importe les résultats et l’atteinte ou non des objectifs.
En fonction des réponses à ces questions, l’employeur a plusieurs options possibles :
- Si les points d’attention rappelés ci-dessus ne soulèvent pas de difficultés (i.e. objectifs réalistes et réalisables au moment de leur fixation, communiqués suffisamment en amont et minimas respectés) alors l’employeur peut refuser toute demande visant à compenser l’impact de la crise sanitaire sur la rémunération variable.
- Pour rappel, la rémunération variable est prise en compte pour le calcul de l’indemnité versée en cas d’activité partielle. Les visiteurs médicaux placés en activité partielle ne sauraient par conséquent être compensés deux fois.
- S’il existe en revanche un doute quant aux chances de succès d’une action en rappel de part variable, l’employeur devrait envisager de procéder aux ajustements nécessaires.
Cela étant, indépendamment du risque contentieux, il peut aussi être opportun d’envisager un substitut compensant la perte de la rémunération variable, ce afin de garder les équipes de vente motivées et éviter une détérioration du climat social.
Ce substitut peut prendre la forme d’une prime exceptionnelle, mais attention : le caractère exceptionnel et la durée limitée de cette prime liée à un contexte particulier doivent être exprimés clairement et appliqués strictement. A défaut, elle risque de se voir requalifier en usage et les salariés seraient en droit d’en exiger le versement ultérieurement.
En conclusion, la crise actuelle doit amener à une certaine prudence quant à la rémunération variable. S’il convient de se rattacher à ce que le contrat ou le plan de rémunération variable prévoit et garder en tête que la rémunération variable ne donne pas un droit acquis à un montant, il ne faut pas exclure le recours à des mesures temporaires qui peuvent éviter un conflit social ou une baisse de motivation des salariés. Face à une crise qui s’éternise, la re-motivation du personnel est en effet l’un des principaux challenges pour les entreprises et la rémunération variable (ou autre substitut) peut permettre de booster cette motivation.